Le laboratoire de la pauvreté

Le laboratoire de la pauvreté

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En économie, Duflo et ses collègues sont parfois appelés les randomistas. Ils ont emprunté à la médecine ce que Duflo appelle un « outil très robuste et très simple » : ils soumettent des idées de politique sociale à des essais contrôlés randomisés, comme on le ferait pour tester un médicament. Cette approche filtre le bruit statistique ; il relie la cause et l'effet. La question politique pourrait être : la microfinance fonctionne-t-elle ? Ou : pouvez-vous inciter les enseignants à se présenter en classe ? Ou : Lorsque vous essayez d'empêcher les personnes très pauvres de contracter le paludisme, est-il plus efficace de leur donner des moustiquaires de protection ou de vendre les moustiquaires à bas prix, en supposant que les gens sont plus susceptibles d'utiliser quelque chose qu'ils ont payé pour? (Un collègue de Duflo a réalisé cette étude, au Kenya.) Comme en médecine, un essai j-pal, dans sa forme la plus simple, divisera au hasard une population en deux groupes et administrera un "traitement" - un manuel, l'accès à un système de microfinance prêt — à un groupe mais pas à l'autre. En raison du caractère aléatoire, les deux groupes, s'ils sont suffisamment grands, auront le même teint : le même mélange de vieux et de jeunes, de joyeux et de tristes, et toutes les autres sources possibles de confusion expérimentale. Si, à la fin de l'étude, un groupe s'avère avoir changé - devenir plus riche, par exemple - alors vous pouvez être certain que le changement est le résultat du traitement. Un chercheur doit poser la bonne question de la bonne manière, et ce n'est pas facile, mais ensuite l'essai prend le dessus et un nombre tombe en vue. Il existe d'autres moyens statistiques de relier la cause à l'effet, mais aucun n'est aussi transparent, selon Duflo, ni aussi apte à bouleverser les attentes. La randomisation "supprime les conjectures, la magie, les prouesses techniques, l'intuition, pour savoir si quelque chose fait une différence", m'a-t-elle dit. Et donc : dans l'essai au Kenya, le meilleur prix pour les moustiquaires était gratuit.

17 mai 2010